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Le Responsive Web Design n’est pas une solution, c’est un compromis

Voilà près de deux ans que je vous parle de Responsive Web Design. Largement plébiscité par la profession, le RWD est néanmoins petit à petit en train de se transformer en buzz word de l’année. Comprenez par là qu’au même titre que les Big Data ou qu’Ajax à son époque, on nous sort le Responsive Web Design en toutes circonstances comme LA solution miraculeuse à tous les problèmes liés à la mobilité. Or, la mobilité n’est pas un problème, c’est une évolution majeure dans les usages, une tendance forte que l’on peut subir ou exploiter. Bref, il est grand temps de démystifier ce terme et de faire preuve de réalisme.

Le Responsive Web Design est donc un terme générique qui désigne une façon de coder une page web pour qu’elle s’adapte à tous les écrans. Cette technique à largement été popularisée par des sites de journaux prestigieux comme le précurseur Boston Globe ou dernièrement le Time Magazine.

time-mag-9351413 La page d’accueil du Time Magazine sur différents terminaux

Le problème du Responsive Web Design est que c’est une technique permettant d’optimiser l’affichage d’un site web conçu pour ordinateurs sur des terminaux mobiles, mais pas de répondre aux besoins spécifiques des utilisateurs en situation de mobilité. Le passage d’un ordinateur avec un grand écran, une souris et clavier à un petit écran tactile n’est pas une mince affaire. Il ne suffit pas de masquer des éléments sur le page ou d’en revoir l’ordre pour satisfaire les mobinautes. C’est un peu comme si vous me disiez qu’il suffit de réduire le nombre de rayons d’un hypermarché pour en faire une supérette de centre-ville. Réduire leur nombre ne suffit pas, il faut tout revoir : les zones de circulation, l’achalandage, la signalétique… Pour un site web, c’est la même chose : si le RWD fonctionne très bien pour un blog et plutôt bien pour un site éditorial, cette technique est par contre perfectible pour un site institutionnel ou une boutique en ligne. La version mobile du site du Vertbaudet est pour moi un très bon exemple : ils ont créé deux versions séparées pour maximiser l’expérience.

verbaudet-mobile-1491982 La version mobile du site du Vertbaudet

Plusieurs voix commencent à s’élever pour remettre en question la pertinence de certaines implémentations du RWD : Not All Responsive Web Design Is Created Equal. Pour résumer les propos de cet article : l’étroitisation de la mise en page pose de gros problèmes ergonomiques que des astuces de code ne peuvent pas forcément gérer (cf. Des mises en page adaptives aux systèmes de navigation adaptatifs).

Outre les problèmes ergonomiques, le RWD pose également quelques soucis en terme de référencement : When Responsive Web Design Is Bad For SEO. Le point de départ de cet article est l’outil mis à disposition récemment par Google pour consolider les URLs de version mobiles. Cet outil met un terme à la pénalisation de l’éparpillement des versions d’un site par rapport à l’utilisation d’une URL unique. Plusieurs arguments particulièrement pertinents sont avancés par l’auteur de cet article pour remettre en cause le choix du RWD :

  • Les internautes en situation de mobilité utilisent des termes et équations de recherche très différentes de celles utilisées depuis un ordinateur fixe ;

  • Les mises en page adaptives ne permettent pas de diminuer les temps de chargement (les éléments de la page sont chargés, mais pas affichés) ;
  • La mise en page ne s’adapte qu’aux smartphones, les utilisateurs de feature phones sont donc mis de côté ;
  • Cela limite la créativité et les possibilités offertes par le rich media.

En résumé : le Responsive Web Design est un compromis très intéressant pour toucher un maximum de mobinautes en limitant les coûts de développement, mais ce n’est pas une solution universelle, loin de là. Vous noterez d’ailleurs que les grands acteurs ne se limitent pas à un site en RWD (Amazon, Ebay…), ils éditent différentes versions pour maximiser l’expérience. Les investissements sont certes plus élevés, mais l’excellence à un prix.

J’ai publié récemment un article sur la façon de remédier aux problèmes de temps de chargement (Améliorez la performance de vos interfaces mobiles avec RESS), aussi je vous propose une piste de réflexion pour maximiser le référencement : utiliser des landing pages mobiles pour répondre aux besoins des internautes en situation de mobilité. Ces landing pages  mobiles seraient spécifiquement référencées en fonction des recherches utilisées en situation de mobile, et proposeraient les contenus et/ou fonctionnalités les plus pertinentes pour les mobinautes.

Tout ceci renforce le besoin des marques avec un minimum d’ambitions de nommer un Chief Mobile Officer pour bien appréhender les besoins des mobinautes et définir une feuille de route cohérente (cf. Pourquoi lancer une application mobile ne sert à rien).